- ACCIDENTS NUCLÉAIRES EN U.R.S.S.
- ACCIDENTS NUCLÉAIRES EN U.R.S.S.LES ACCIDENTS NUCLÉAIRES EN U.R.S.S.L’accident de Tchernobyl, par la large diffusion médiatique dont il a fait l’objet, a alerté l’opinion publique internationale sur les problèmes desécurité nucléaire en Union soviétique. Mais bien d’autres accidents ou incidents directement liés aux activités nucléaires se sont produits dans cette partie du monde. Les conséquences de ces accidents ont affecté et affecteront encore non seulement cette aire géographique, mais les eaux des océans et l’espace. Les informations ont d’abord filtré au compte-gouttes, à travers les rideaux de fer concentriques qui entouraient toutes ces activités, puis ont été progressivement, mais inégalement, divulguées depuis la désintégration de l’U.R.S.S.Le complexe MayakL’accident nucléaire de Kyshtym est le plus grave de tous ceux qui sont survenus dans l’ex-Union soviétique; ses conséquences sont, à ce jour, les plus importantes au monde. En réalité, il faut le replacer dans l’ensemble des accidents et des dispersions de radioactivité qui se sont produits dans cette région industrialisée de l’Oural – le complexe Mayak – située entre Ekaterinbourg (ex-Sverdlovsk) et Tcheliabinsk. Celui qui s’est produit près de Kyshtym, le 27 septembre 1957, a été le plus dramatique.Lorsque Staline décida, au soir d’Hiroshima, de rattraper les Américains dans la course aux armements nucléaires, fort des renseignements que lui avait apportés l’espionnage des travaux menés outre-Atlantique, il put très vite engager un programme permettant de produire avec rapidité et discrétion de nombreuses armes de qualité acceptable. Il ne pouvait mieux choisir, pour superviser l’opération, que le chef du N.K.V.D., Beria, orfèvre en matière de secret, spécialiste de méthodes quelque peu expéditives pour le recrutement. Il sut sélectionner les scientifiques et autres spécialistes indispensables, les installer confortablement dans des cités interdites coupées du monde extérieur, sortes de «goulags de luxe», où ils auraient pour mission de concevoir, définir et réaliser tel ou tel élément des armes. Chaque ville portait le nom d’une ville voisine, accompagné d’un chiffre. C’est ainsi que Tcheliabinsk 40 et Tcheliabinsk 65, peuplées chacune d’environ cent mille habitants, avaient pour objectif principal la production du plutonium utilisé comme explosif dans les armes. Pour cela, il fallait des réacteurs plutonigènes dans lesquels l’uranium se transforme en plutonium. Six ont fonctionné sur le site de Tcheliabinsk 40, à une quinzaine de kilomètres à l’est de Kyshtym. Le plutonium produit était extrait dans une usine chimique implantée à Tcheliabinsk 65, à une dizaine de kilomètres au nord-est de Kyshtym. Dans ce type d’usine, le mélange uranium-plutonium est d’abord extrait des éléments combustibles irradiés à l’aide d’acides très concentrés, puis on sépare le plutonium avec des solvants sélectifs. Il s’agit de procédés à hauts risques: l’agressivité chimique et les risques d’explosion sont inhérents à la nature des produits utilisés et l’intense radioactivité exige des précautions extrêmes pour toute intervention humaine.Durant les huit premières années, les abondants déchets résultant de ces cycles de traitement ont été déversés directement dans la rivière Tetcha, au mépris total de l’environnement. Les estimations récentes des rejets de cette période, établies en liaison avec les responsables russes, font état d’une activité de 50 millions de curies (cf. tableau, pour les unités utilisées pour les mesures de radioactivité). À partir de 1952, de nombreux lacs de cette région ont été aménagés soit en bassins de sédimentation pour concentrer les déchets les plus actifs, soit en réservoirs de stockage où ont été déposés des récipients en acier, enfouis dans des cellules en béton recouvertes d’une dalle de 2,5 m d’épaisseur et dotées d’un système de refroidissement indispensable pour évacuer la chaleur dégagée par les déchets radioactifs.Le système de refroidissement des cuves de stockage présentait des défaillances dès 1956. Celles-ci provoquèrent la surchauffe du contenu des réservoirs et l’évaporation de l’eau des déchets. Allégés, les réservoirs se mirent à flotter, ce qui entraîna des déformations et des fuites des canalisations qui contaminèrent l’eau qui circulait autour des réservoirs pour les refroidir. Il fallut traiter cette eau dans une installation déjà saturée. On eut alors recours à une procédure de réfrigération intermittente, jusqu’à ce que l’échangeur d’une cuve tombe complètement en panne à l’automne de 1956 et soit laissé à l’abandon; la dernière température mesurée avant l’explosion du 27 septembre 1957 était proche de 350 0C. Une étincelle aurait déclenché l’explosion, dont l’énergie a été estimée entre 5 et 70 tonnes d’équivalent T.N.T. Le couvercle en béton de 2,5 m d’épaisseur fut projeté à plus de 25 mètres. La radioactivité alors dispersée a été estimée à 5 millions de curies de 90Sr (cet isotope 90 du strontium, de période 28 ans, qui se comporte dans l’organisme comme le calcium, peut être fixé dans les os par la voie de la chaîne alimentaire), ce qui représente 50 p. 100 de la radioactivité totale. Chacune des soixante cuves de ce centre de stockage était censée contenir une activité totale de 20 millions de curies (Ci). Plusieurs cuves ont été affectées par l’explosion et leur fuite a contribué à la contamination en 90Sr.Cet accident est resté secret pendant plus de trente ans. Une surface de 120 kilomètres carrés était le siège d’une activité 90Sr supérieure à 100 Ci/km2 (3,7 millions de Bq/m2) avec à l’intérieur une zone de 5 kilomètres carrés où l’activité dépassait 2 000 Ci/km2, (74 millions de Bq/m2). Les Soviétiques ont décidé d’évacuer une zone de 1 000 kilomètres carrés où vivaient dix mille habitants et où régnait une activité égale ou supérieure à 2 Ci/km2 de 90Sr au sol (74 000 Bq/m2). La région a été interdite et désertifiée: habitants évacués sans le moindre bagage, villages rasés, bétail abattu et enterré sur place. Au total, pour les deux zones de Tcheliabinsk et Ekaterinbourg, la culture a été interdite sur plus de 100 000 hectares et n’a repris actuellement (au moins officiellement) que pour environ la moitié des terres cultivables réhabilitées.Dans la population, on estime à deux cent cinquante mille le nombre des personnes qui ont été exposées à une dose anormalement élevée, non seulement à cause de l’accident de 1957 mais du simple fait du fonctionnement «normal» du complexe Mayak à proximité duquel elles vivaient. Elles étaient atteintes soit par irradiation externe, soit par ingestion de radioéléments présents dans l’eau ou dans les aliments contaminés. Vingt-huit mille personnes ont été particulièrement exposées et auraient reçu en une dizaine d’années une dose d’environ 200 millisieverts (20 rems). La dose efficace reçue par les habitants d’un des derniers villages évacués, Metlino, sur la rivière Tetcha, a été évaluée à 1,7 Sv, dose à laquelle apparaissent des troubles de santé très sérieux.Pour les employés, un suivi rétrospectif méticuleux, accompli dans les années 1980, a pu permettre d’avoir une idée des dommages de santé subis par 85 p. 100 d’entre eux. On constate que les travailleurs du retraitement ont été plus touchés que ceux des réacteurs. Les «maladies chroniques du rayonnement» (euphémisme qui recouvre un certain nombre de troubles associés à un équivalent de dose compris entre 1,5 et 2,5 Sv) affectent une proportion de 5,8 p. 100 du personnel des réacteurs (avec des doses internes cumulées sur une vie entière de 2,6 Sv) et une proportion de 22,6 p. 100 du personnel affecté au retraitement (avec des doses externes cumulées de 3,4 Sv). En données très simplifiées, qui ne portent que sur 85 p. 100 du personnel, on trouve que, statistiquement, la fréquence de mortalité par cancer passe de 4,8 p. 100 pour une dose moyenne cumulée inférieure à 1 sievert à 8,4 p. 100 pour une dose moyenne cumulée supérieure à 1 sievert.La menace pour l’environnement a été estimée par les experts à plus de dix fois celle des rejets de Tchernobyl; elle subsistera encore longtemps, puisque les installations risquent logiquement de se dégrader. Toutes les régions polaires sont aussi menacées puisque la Tetcha, qui appartient au bassin de l’Ob, alimente la mer de Kara. L’équilibre écologique de cette mer est déjà mis en péril par d’autres déchets, provenant soit des explosions nucléaires à buts pacifiques effectuées en Sibérie, soit des essais d’armes en Nouvelle-Zemble, soit encore des épaves de navires nucléaires qui jonchent la mer de Barents.C’est le biologiste Z. Medvedev, responsable des études d’effets des radiations ionisantes, qui a dévoilé l’accident de 1957, après avoir fui l’Union soviétique pour les États-Unis. Ces révélations, d’abord accueillies avec scepticisme par les experts américains, furent ensuite confirmées par la C.I.A., notamment lors de survols par des avions de reconnaissance à haute altitude qui allaient provoquer l’ire de Nikita Khrouchtchev et sa riposte par la destruction d’un de ces «U2». Ainsi a été observée la disparition des villages et l’interdiction de certains itinéraires routiers, authentifiant les affirmations de Medvedev et la gravité du désastre.L’accident de TchernobylAu premier abord, il n’y a pas une grande différence fonctionnelle entre une centrale thermique produisant de l’électricité à partir de combustibles fossiles et une centrale nucléaire où la chaleur des réactions de fission est transformée en énergie mécanique, elle-même convertie en énergie électrique. En réalité, on ne peut ignorer les caractéristiques particulières de la source de chaleur nucléaire: même si l’on plonge dans le cœur du réacteur toutes les barres absorbantes – nécessaires en partie pour ajuster le niveau de puissance souhaité et indispensables en totalité pour arrêter le réacteur –, on ne peut obtenir une baisse de puissance instantanée; et cela s’explique par la nature physique des réactions nucléaires. Il est alors indispensable de continuer à extraire du cœur les calories produites, sinon la température s’élèverait dangereusement, jusqu’à la fusion du cœur ou à l’apparition de réactions chimiques violentes.C’est à ce souci que se rattachait l’expérience décidée sur la tranche 4 de la centrale de Tchernobyl (Ukraine). Il s’agissait de vérifier une méthode permettant de conjurer les effets potentiellement graves d’une interruption de l’alimentation électrique en cas d’arrêt inopiné du réacteur. Certes, aussitôt qu’il y a «perte de l’alimentation électrique», des groupes de secours sont mis en route, mais il leur faut quelques secondes pour atteindre leur régime de production. L’idée était de combler ce creux d’alimentation en utilisant l’énergie cinétique accumulée par la rotation de l’ensemble turboalternateur, énergie qui est loin d’être négligeable. En effet, cette énergie peut alimenter durant 15 à 30 secondes l’ensemble de pompes qui fait circuler l’eau de refroidissement dans un réacteur de type R.B.M.K. (Reaktor Bolchoi Mochtchnosti Kanalni), temps suffisant, puisqu’il faut environ 5 secondes pour que les groupes de secours prennent le relais. Cette expérience de vérification, hors des plages normales de fonctionnement définies par les concepteurs, fut donc décidée par l’administration centrale et dirigée par un de ses représentants – sans doute un théoricien des réacteurs nucléaires plutôt qu’un praticien – venu de Moscou pour la circonstance.Quelques précisions préalables aideront à mieux appréhender le déroulement des événements. Tout d’abord, les réacteurs R.B.M.K. ont été conçus en fonction de leur mission prioritaire: produire du plutonium militaire, en quantités beaucoup plus importantes que ceux du complexe Mayak (l’ensemble des réacteurs R.B.M.K. est capable de produire annuellement plus de 10 tonnes de plutonium de qualité militaire). Le combustible nucléaire y est renouvelé à un rythme très élevé (de l’ordre de vingt fois plus fréquemment que dans les réacteurs électrogènes en service en France) avant que n’apparaisse une proportion trop grande (de 3 à 5 p. 100) de plutonium 240. Cela impose un déchargement en marche si l’on veut avoir malgré tout une production électrique importante. Ce déchargement s’accomplit par des orifices situés au-dessus du cœur. Il en résulte une complication de la répartition des barres de contrôle et de leur utilisation en vue de l’équilibrage des flux de neutrons dans tout le réacteur. Il serait aussi plus difficile d’entourer le réacteur d’une épaisse enceinte en béton pour confiner la radioactivité en cas d’accident (l’ensemble est simplement recouvert d’une dalle en béton non étanche). La priorité de la mission plutonigène explique sans doute le double rôle donné à l’eau: transporter les calories et jouer un rôle modérateur en complément du graphite (il est en effet nécessaire de «modérer» la vitesse des neutrons dans ce type de réacteur, pour améliorer leur rendement de fission).Dans la plupart des réacteurs en service, il se forme, à partir d’un produit de fission (le tellure 135), un isotope gênant, le xénon 135, qui a un très grand pouvoir d’absorption des neutrons; il en résulte une diminution de la réactivité pouvant aller jusqu’à l’arrêt du réacteur aux bas régimes de fonctionnement. Ce phénomène «inexorable» d’empoisonnement oblige à prévoir un excès de réactivité, qui introduit un risque dans le pilotage des réacteurs. Afin d’éviter que cet état de choses ne donne lieu à de fausses manœuvres dangereuses, on a recours à des sécurités complémentaires ou à des consignes particulières destinées aux opérateurs.Les réacteurs R.B.M.K. présentent un défaut lié au double rôle joué par l’eau bouillante: à basse puissance, la température tend à croître et des bulles de vapeur apparaissent dans l’eau, ce qui fait chuter sa densité moyenne de sorte que de plus nombreux neutrons sont disponibles pour augmenter la réactivité. C’est là une cause d’instabilité très dangereuse qui conduit à interdire, dans les consignes de pilotage, des incursions dans ces zones de fonctionnement.Ces risques avaient-ils été répertoriés avant l’expérience? On ignore si un dossier préliminaire complet de sûreté a été établi. On sait seulement qu’il était prescrit de mener l’expérience sans sortir de la plage de puissance de 700 à 1 000 mégawatts thermiques – soit entre la moitié et les deux tiers de la puissance normale d’alimentation de l’un des deux groupes turboalternateurs –, de maintenir pendant toute l’expérience un minimum de barres de contrôle insérées dans le réacteur et de respecter une procédure précise pour réduire la puissance très progressivement.L’expérienceAprès déconnexion du système d’arrêt d’urgence du réacteur pour qu’il n’intervienne pas intempestivement pendant les phases décisives, l’expérience pouvait commencer aux premières heures du vendredi 25 avril 1986. Un bouton avait été ajouté au tableau de commande pour déclencher manuellement l’arrêt «imprévu» du réacteur et la prise de relais électrique de la ligne d’arbre turboalternateur; ce déclenchement était prévu dans les premières heures du 26 avril. Dès le début de l’après-midi du 25, la puissance thermique avait été réduite progressivement à 1 600 mégawatts et l’un des deux turboalternateurs de 500 mégawatts électriques découplé du réseau. À ce moment le centre de répartition de la production électrique de Kiev a demandé à la tranche 4 de Tchernobyl une fourniture de courant imprévue, ce qui a conduit à stopper la baisse de puissance de 14 à 23 heures. Cette demande aurait dû être refusée, car elle perturbait le déroulement programmé et allait contribuer à augmenter l’empoisonnement au xénon qu’il faudrait compenser en extrayant progressivement les barres de contrôle. De plus, le circuit de refroidissement de secours avait été découplé depuis 14 heures sans qu’on connaisse la raison de cette décision et de son non-réenclenchement (un oubli des opérateurs?). À 23 heures la baisse de puissance reprend; à minuit, sont atteints les 700 mégawatts, limite basse imposée. Le 26, à 0 h 30, il était prévu de passer d’un système de régulation automatique à un système manuel, mais l’opération se déroule mal, la puissance tombe à 30 mégawatts. Il semble que, pendant cette période, il y ait eu désaccord entre les opérateurs qui étaient tenus de respecter des consignes de baisse de puissance très progressive et l’envoyé de Moscou. Une première tentative de baisse des barres ayant échoué, ce dernier a interdit une seconde tentative qui aurait peut-être permis d’éviter une aggravation de la situation. Entre 0 h 30 et 1 heure, la puissance put être stabilisée à 200 mégawatts, mais au prix d’une nouvelle extraction de barres de contrôle; on était alors bien au-dessous du minimum de barres à maintenir dans le cœur, avec une puissance encore bien inférieure à la limite de 700 mégawatts prescrite.Le réacteur est alors en plein domaine d’instabilité, interdit d’accès par les constructeurs selon les critères de puissance et du nombre de barres de contrôle insérées. Les intervenants, sans doute inconscients de la gravité des risques encourus, poursuivent l’expérience en appliquant les consignes qui avaient été définies dans l’hypothèse d’un fonctionnement à l’intérieur du domaine de stabilité. Ils remettent en route – comme prévu par le programme non perturbé – les deux dernières pompes de circulation, créant ainsi un refroidissement dangereusement surabondant, et ignorent les signaux d’arrêt d’urgence que provoque cette décision.Entre 1 h 21 min 30 s et 1 h 23 min, les événements se précipitent. Les vannes d’admission de la vapeur à la turbine sont fermées. Les quatre pompes principales fonctionnent sur l’inertie de l’arbre turboalternateur mais ralentissent progressivement; le réacteur est toujours en marche, l’eau chauffe, se vaporise, la réactivité s’accélère.À 1 h 23 min 40 s, le chef opérateur fait enfin chuter toutes les barres de contrôle et de sécurité, mais leur structure est telle que, dans la première phase d’introduction, un cylindre en graphite précède la partie absorbante, de sorte que l’eau, qui avait un rôle modérateur, est chassée, ce qui provoque, sur 1,25 m de chute, une montée brutale de réactivité qui dure de 3 à 4 secondes car les barres, très lentes, mettent 18 secondes pour chuter. Cette excursion d’énergie est sans doute à l’origine de la première explosion perçue par les opérateurs.Au-delà de cet instant, les phénomènes destructeurs se sont succédé et des scénarios divers ont été imaginés a posteriori d’après l’examen des débris du réacteur. Un fort dégagement d’énergie chimique entre les combustibles rompus et l’eau explique le soulèvement de la dalle supérieure du réacteur qui est retombée sur la tranche. Une forte déflagration perçue ensuite peut provenir soit d’une réaction libérant l’hydrogène – de l’eau décomposée au contact des gaines en zirconium surchauffées du combustible –, soit de la détente de la vapeur à 70 bars lors de la rupture des tubes de force. Enfin, le graphite irradié est le siège d’une accumulation d’énergie, l’effet Wigner; la libération de cette énergie pourrait être à l’origine des feux de graphite qui ont persisté plusieurs jours et contribué à la dispersion de la radioactivité dans le nuage s’échappant de la centrale détruite. On a aussi émis l’hypothèse d’une fusion des barres de sécurité qui se seraient coincées avant d’achever leur chute.C’est ainsi qu’une expérience visant à améliorer la sûreté d’un réacteur s’est terminée en catastrophe.Conséquences de l’accidentL’Organisation mondiale de la santé (O.M.S.) a organisé deux conférences (nov. 1995 à Genève et avr. 1996 à Vienne) lors desquelles ont été présentés les résultats des études des effets de cette catastrophe sur la santé.Sur environ cinq cents personnes (pompiers et exploitants) présentes sur le site juste après l’accident, deux sont mortes immédiatement, et deux cent trente-sept furent hospitalisées pour un syndrome aigu d’irradiation, dont vingt-huit devaient décéder rapidement. Sur un total de six cent cinquante mille personnes qui ont nettoyé le site (surtout des militaires du contingent), surnommées les «liquidateurs», soixante-cinq mille ont reçu des doses estimées à plus de 250 millisieverts, cent trente-cinq mille des doses comprises entre 100 et 165 millisieverts. Les quatre cent cinquante mille autres sont supposées avoir reçu des doses inférieures à 100 millisieverts.Les niveaux de contamination des sols et d’irradiation des populations sont essentiellement dus au césium 137 et à l’iode 131. Ce dernier est responsable d’une augmentation des cancers de la thyroïde chez les enfants de moins de quinze ans. L’O.M.S. souligne par ailleurs une forte augmentation de troubles psychologiques liée aux évacuations forcées et à la crainte permanente de souffrir des retombées radioactives.Les accidents des sous-marins nucléaires soviétiquesPour l’Union soviétique, la mise en valeur de l’espace nord-sibérien a été l’un des grands objectifs après la fin de la Seconde Guerre mondiale, et la flotte de l’Arctique allait y contribuer largement, avec des brise-glace nucléaires qu’elle était seule au monde à posséder. En fait, derrière ces ambitions d’apparence pacifique, il y avait avant tout la perception stratégique de la sécurité face aux États-Unis vus depuis Mourmansk à travers le Groenland et depuis le Kamtchatka à travers la mer de Béring. Mais, pour franchir les quelque 2 700 milles séparant la presqu’île de Kola de l’Alaska, il fallait des sous-marins nucléaires capables de passer sous la banquise du pôle Nord. Cette nécessité s’imposait comme la priorité absolue et, dès 1954, la décision fut prise de construire un premier sous-marin nucléaire, précurseur d’une série de navires pratiquement invulnérables dans la zone arctique.Comme pour chaque entreprise prioritaire de la défense soviétique, tous les moyens furent accordés. Avec un profil de coque très étudié et deux réacteurs nucléaires pour sa propulsion, le sous-marin devait surclasser ses adversaires américains. Le premier, le K3, fut lancé en avril 1957 et commença ses essais en mer en août 1958. Au cours de ces essais, plusieurs avaries se produisirent dans les circuits des réacteurs. Bien entendu la physique de base est la même pour les réacteurs des sous-marins que pour ceux de Tchernobyl. Les mêmes soucis de refroidissement à l’arrêt vont donc intervenir, mais tout est rendu plus difficile par l’ambiance très dure qui règne à bord d’un submersible et par les sollicitations de fonctionnement et d’arrêt très brutales imposées en utilisation militaire. La différence avec un R.B.M.K. est aussi grande qu’entre une voiture de formule 1 et un camion. Lors de la réparation des avaries, les intervenants étaient exposés à des doses exceptionnellement élevées. Lorsque les spécialistes eurent dépassé ces doses, alors que les réparations étaient loin d’être achevées, l’un des appelés les plus compétents a proposé que les risques soient partagés par tous à bord. Sa suggestion fut acceptée par l’équipage, et la ventilation répartissait désormais la radioactivité dans l’ensemble des compartiments du sous-marin. Lorsque tout l’équipage atteignait l’équivalent de cent doses limites, le sous-marin faisait surface pour une ventilation générale. Sans pouvoir parler d’accident caractérisé, on peut penser que le K3 détient le record mondial de la radioactivité spécifique. On sait par les estimations soviétiques que ce taux a été plus de mille fois supérieur à celui des sous-marins qui lui ont succédé. C’est ce sous-marin, extrêmement fatigué et rapiécé de toutes parts, qui fut cependant choisi pour arriver le premier au pôle. Après une révision complète dans l’hiver de 1962-1963, le K3 atteignait le pôle Nord le 17 juillet 1963. Le 8 septembre 1967, le K3, rebaptisé Leninski-Komsomol , après avoir frôlé à plusieurs reprises l’accident fatal, n’a pu éviter un drame: un jet d’huile bouillante s’échappant d’une canalisation éclatée s’est enflammé, après avoir provoqué un court-circuit dans un éclairage. Les premières victimes furent brûlées vives, d’autres furent asphyxiées par l’oxyde de carbone. Il y eut trente-neuf morts; environ quatre-vingts marins furent sauvés.Le premier naufrage important est celui du K129, sous-marin nucléaire avec un équipage de plus de cent hommes, armé de trois missiles balistiques, qui a disparu dans le Pacifique, près de l’île de Guam, en mars 1968. Il semble possible que l’épave, qui gisait par 5 000 mètres de fond, ait été renflouée secrètement par les Américains, après une préparation de six ans imposée par la difficulté de l’opération.Un autre naufrage s’est produit le 24 avril 1968, dans l’océan Pacifique également, à 750 milles au nord-ouest de l’île d’Oahu (Hawaii). Le sous-marin (dénommé «Golf» dans la nomenclature américaine) a coulé après une série d’explosions à bord. Il portait cinq armes nucléaires. La proue fut récupérée par le Glomar Explorer en 1974. En l’absence de survivants, on n’a pas d’autres détails sur cet accident.En mai 1968, un accident grave est survenu sur un sous-marin d’un autre type, le K27. Son réacteur, dit à neutrons intermédiaires (moins ralentis que dans les réacteurs classiques), utilisait comme fluide caloporteur un métal liquide constitué d’un mélange de bismuth et de plomb qui se solidifie à basse température (au-dessous de 125 0C). Les avantages par rapport à l’eau étaient la rapidité de mise en route, la puissance disponible plus élevée, la pression du circuit primaire beaucoup plus faible. L’inconvénient majeur était l’obligation de maintenir liquide le mélange en toutes circonstances. Le K27 était en mer lorsque ses deux réacteurs sont devenus successivement incontrôlables; la raison était une obstruction des circuits de circulation du métal. L’un des réacteurs se mit en surchauffe, les cartouches de combustible s’ouvrirent, la radioactivité dépassa 2 000 röntgens autour des réacteurs puis dans le local de commande, un jet de gaz radioactif diffusa dans tout le sous-marin. Jusqu’à son retour au port de Gremika, sur le seul réacteur en fonctionnement précaire, les doses reçues par une partie de l’équipage ont été considérables. Le bilan fut de cinq morts et de douze personnes gravementirradiées. La responsabilité de l’accident incombe au commandement de la flotte, qui avait refusé que l’opération de régénération du mélange bimétallique soit faite à son échéance pour permettre au K27 de participer à des manœuvres navales. Alors que les Américains abandonnaient le métal liquide après un essai décevant sur un seul sous-marin, le Sea-Wolf , les Soviétiques ont persisté sur plusieurs prototypes, dont certains sont encore réchauffés à quai. De plus, les épaves sont très dangereuses et il est difficile de s’en débarrasser en les immergeant, comme cela a été couramment pratiqué pour une quinzaine de réacteurs à eau autour de la Nouvelle-Zemble.En avril 1970, le sous-marin K8, porteur d’armes nucléaires, coulait au large du golfe de Gascogne à la suite d’une explosion probablement due à une intrusion d’eau dans le réacteur. Une partie de l’équipage put abandonner le navire, cinquante-deux victimes furent dénombrées. Le site, situé vers 150 ouest et 460 nord a été surveillé pendant plusieurs années par un navire soviétique.Le sous-marin K19 avait connu un premier accident grave en juillet 1961, peu après sa mise en service. En effet, celle-ci s’était déroulée sans que la montée en puissance du réacteur soit surveillée. Les opérateurs n’ont pas remarqué que les manomètres des circuits de refroidissement n’étaient pas branchés, l’oubli n’étant décelé que lorsque la pression eut atteint le double de sa valeur admissible. Les canalisations, déformées par cette surpression, auraient dû être réparées, mais il aurait fallu rendre compte, subir une enquête et des sanctions; on passa outre. Malheureusement, peu de temps après, au cours d’une manœuvre navale, le circuit primaire cédait. Le commandant aurait dû interrompre l’exercice pour réparer, mais il persista et l’un des réacteurs s’arrêta complètement. Il fallait impérativement refroidir le réacteur où la chaleur continuait à se dégager. Pour cela, une circulation d’eau froide fut improvisée sur le circuit défaillant. Son installation exposa plusieurs intervenants à des doses de rayonnement élevées. Il y eut sept morts dans les jours qui suivirent et trois autres marins fortement irradiés survécurent. Le second accident sur le K19 survint en février 1972, dans l’Atlantique nord. Le sous-marin avait pu lancer un court message de détresse annonçant qu’il y avait un incendie à bord et plusieurs victimes. Dans la tempête, les secours eurent grand mal à approcher du sous-marin et à évacuer par hélicoptère une quarantaine de marins non indispensables à la survie du navire. On savait qu’un compartiment était complètement détruit par le feu et les occupants brûlés vifs, mais que, dans le compartiment voisin, douze marins survivaient, dans l’obscurité, presque sans vivres, récupérant l’eau de condensation des parois, conscients que toute tentative d’évasion en traversant le compartiment des réacteurs les vouait à une mort certaine. Ils furent libérés au bout de vingt-quatre jours. Le bilan fut de trente morts et plusieurs marins gravement irradiés.Le 3 octobre 1986, dans les Bermudes, à bord du K219, l’un des sous-marins les plus modernes de la flotte soviétique, se produisait un incendie dans un tube de lancement de missiles balistiques, accompagné d’une explosion. Malgré les efforts des navires de secours, ce sous-marin réputé indestructible sombrait à une profondeur de près de 5 000 mètres. Il y eut quatre victimes dont le matelot qui réussit à stopper le réacteur nucléaire, réduisant ainsi les risques liés à cette épave.Le dernier accident que nous évoquerons est celui du K278. Ce sous-marin ultramoderne, doté d’une coque en titane lui permettant d’atteindre une profondeur de 1 000 mètres, a sombré en mer de Norvège le 7 avril 1989. Un début d’incendie s’était déclaré dans le septième compartiment; le seul matelot présent dans ce compartiment ne répondait plus, il fut décidé d’envoyer du fréon pour étouffer l’incendie. Malheureusement, une conduite d’air comprimé fut ouverte par un arc électrique, l’air attisa le feu qui se transmit au compartiment voisin dont les occupants furent tués sur le coup. L’accident allait s’aggraver en chaîne par arrêt des réacteurs et des pompes de refroidissement et multiplication des courts-circuits; l’incendie s’étendait et le sous-marin était encore à 150 mètres de profondeur. Avec des précautions infinies, l’un des officiers réussit à faire surface avec le peu d’air encore disponible. Progressivement, tout l’équipage encore valide et non indispensable aux manœuvres a pu sortir sur le pont. Quelques heures plus tard, alors que les secours, appelés en secret selon les règles immuables, n’étaient pas encore arrivés sur place, la coque en titane éclatait et le sous-marin sombrait. Le bilan de quarante-deux morts n’aurait pas été si important si les Norvégiens avaient pu intervenir – ils en avaient les moyens –, mais il aurait fallu un accord soviétique, donc lever ce secret encore aussi lourd en 1989, même en territoire neutre.Au total, sur environ deux cent trente sous-marins nucléaires que l’U.R.S.S. aurait construits, on compte plus d’une vingtaine d’accidents graves, dont une douzaine de naufrages ou d’accidents avec plusieurs morts. Il faudrait ajouter à ces accidents de la marine nucléaire ceux des brise-glace extrêmement puissants. On connaît uniquement celui du brise-glace Lénine .Enfin, on peut rattacher à ces accidents ceux qui ont affecté les dépôts de missiles servant à propulser les armes nucléaires des sous-marins. Bien entendu, ces propulseurs étaient stockés séparément des têtes, mais les explosions dans ces dépôts méritent d’être rappelées en raison de leur importance. En particulier, le 13 mai 1984, une explosion d’une puissance comparable à celle d’une explosion nucléaire s’est produite à la base navale de Severomorsk, à 16 kilomètres de Mourmansk. Cinq jours plus tard, le sinistre n’était toujours pas maîtrisé. Lorsque le nuage s’est enfin dissipé on pouvait constater la destruction de trois installations: le dépôt des missiles tactiques surface-air et surface-surface de la flotte; le dépôt des composants sensibles des armes, charges militaires non nucléaires, carburant des missiles; le dépôt des munitions navales. De nombreux bâtiments et hangars ont été détruits ou endommagés. Parmi les destructions, on comptait trois cent vingt des quatre cents missiles mer-mer SS N3 et SS N12, la totalité des quatre-vingts missiles antinavires SS N22.On estime qu’au moins deux cents personnes auraient été tuées et autant blessées. Six autres explosions ont été observées sur le sol soviétique depuis décembre 1983, dont une dans un autre dépôt de Severomorsk.Les réacteurs nucléaires dans l’espaceLe problème de l’observation des activités militaires terrestres à partir du ciel avait été momentanément résolu par les Américains grâce aux avions U2, volant à très haute altitude. Instruits par la croissante vulnérabilité de ce moyen d’observation, incapables de mettre en service rapidement des aéronefs d’une capacité équivalente et forts de leur puissance spatiale prépondérante, les Soviétiques ont décidé d’utiliser des satellites d’observation. L’espace était et reste beaucoup moins réglementé que la haute atmosphère en matière de souveraineté territoriale, et les satellites sont presque invulnérables. Mais les radars d’observation devaient être mis en orbite à basse altitude, de l’ordre de 200 kilomètres au-dessus de la Terre, et l’électronique peu performante de ces radars imposait une source d’énergie très importante, excluant les batteries chimiques et, a fortiori, les panneaux solaires qui auraient de toute façon freiné le satellite et abaissé très rapidement son orbite. Il restait le recours à l’énergie nucléaire. La première solution envisagée utilisait la conversion thermo-ionique, l’énergie électrique étant obtenue à partir d’un corps radioactif dont la chaleur est convertie en électricité, une sorte de pile pour «pacemaker» à une échelle géante. Le rendement trop faible de cette formule a orienté le choix final vers un petit réacteur nucléaire. Les Soviétiques ont ainsi lancé vingt-cinq satellites de ce type, dont la durée de vie restait très courte (environ un mois) en raison de leur faible altitude. Ils étaient lancés le plus souvent par paires essentiellement pour couvrir l’observation des manœuvres navales américaines. Pour les premiers exemplaires, la rentrée dans l’atmosphère était mal maîtrisée, le lieu d’impact au sol difficilement prévisible. Les premières rentrées se sont terminées soit dans les immensités des territoires de souveraineté ou tutelle soviétique, soit dans les déserts océaniques. On a frôlé cependant l’accident grave. Le Norad (North American Aerospace Defense) – organisme américain qui surveille tous les objets gravitant autour de la Terre – avait annoncé aux Soviétiques qu’un de leurs satellites atteindrait le sol le 28 janvier 1978 entre la Californie et le nord du Canada. Le satellite atterrissait dans le Nord canadien le lendemain de l’avertissement du Norad. Heureusement, il n’y eut pas de victimes. Seuls se trouvaient dans la région quelques prospecteurs de minerais, dotés pour leur mission de détecteurs de radioactivité. Ils approchèrent les débris, identifièrent leur nature en attendant l’arrivée des équipes d’intervention envoyées par les États-Unis à la demande du Canada..Certes, cet accident aurait été beaucoup plus grave si l’impact s’était produit par exemple près de Los Angeles ou de San Francisco, mais il témoignait cependant d’un incroyable «sans-gêne» des Soviétiques, qui prenaient le risque depolluer n’importe quel point de la planète. À raison d’une cinquantaine de kilogrammes d’uranium très enrichi par réacteur, on peut estimer que ce sont ainsi près de 1 300 kilogrammes d’une matière rare, chère et dangereuse qui sont dispersés quelque part à la surface de la Terre ou au fond des océans. Il s’agit d’une atteinte à l’environnement bien supérieure à certains rejets en mer de déchets peu radioactifs, déplorables certes, mais exagérément dénoncés par certains médias.De nombreux accidents ou incidents se sont produits en ex-Union soviétique. Ces accidents ont eu rarement une cause unique et très souvent des précurseurs sous-estimés. Sur le plan politique, on voit que tous les accidents évoqués sont liés aux programmes d’armement soviétiques. La hâte dans laquelle ont été édifiés les complexes militaro-industriels en vue de rattraper puis de surpasser les États-Unis explique la plupart de ces déboires. Il est certain que, pour Mikhaïl Gorbatchev, la catastrophe de Tchernobyl, survenant après les autres accidents, enlevait beaucoup de crédibilité à la force nucléaire soviétique et qu’il dut en tenir compte dans sa politique intérieure et extérieure.Annexe: radioactivité et santéPour donner quelques repères, l’équivalent de dose reçu annuellement en France par un adulte est compris entre 2 et 4 mSv (0,2-0,4 rem; pour les unités, voir tabl.); les régions granitiques sont celles où les doses sont les plus élevées; les habitants du Kerala, région du sud-ouest de l’Inde, reçoivent une dose d’environ 0,6 rem par an (jusqu’ici on n’a pas relevé d’effets sur la santé de cette population); une radioscopie des poumons correspond à 0,1 rem. En ce qui concerne les effets des irradiations, une dose de 4 à 5 Sv est «létale 50», c’est-à-dire qu’elle conduit à 50 p. 100 de mortalité en l’absence de traitement. Pour des doses plus fortes, on observe à 8 Sv des troubles respiratoires et intestinaux. Pour les doses inférieures à 4 Sv on observe: à 0,3 Sv (30 rems) des anomalies minimes dans la formule sanguine (baisse des lymphocytes); à 1 Sv (100 rems), les symptômes sont directement perceptibles: nausées et vomissements; à 2 Sv (200 rems) l’apparition d’anémie, d’infection, d’hémorragies rend indispensable l’hospitalisation; à 3 Sv (300 rems) correspondent une rougeur anormale de la peau et la perte des cheveux, signes avant-coureurs de troubles plus graves.
Encyclopédie Universelle. 2012.